Voici un petit aperçu de la prose brillante d'Estienne DOLET (1509-1546) auteur de La manière de bien traduire d'une langue à l'autre. (Lyon : E. Dolet, 1540) Je ne reproduis ici qu'un extrait de ce texte pourtant très court en français modernisé par mes soins d'après le fac-similé disponible sur le serveur de la BNF. Deux versions numérisées sont disponibles sur un site personnel (non identifié) hébergé par la Tokyo University of Foreign Studies : l'une qualifiée d'"originale", l'autre en "Orthographe modernisée". |
[La] matière de l'auteur qu'il traduit ; car par cette intelligence, il ne sera jamais obscur en sa traduction : et si l'auteur lequel il traduit est aucunement scabreux, il le pourra rendre facile et du tout intelligible.
La seconde chose qui est requise en traduction, c'est que le traducteur ait parfaite connaissance de la langue de l'auteur qu'il traduit et soit pareillement excellent en la langue en laquelle il se met à traduire. Par ainsi il ne violera, et n'amoindrira la majesté de l'une et l'autre langue.
Le tiers point est qu'en traduisant, il ne se faut pas asservir jusqu'à là que l'on rende mot pour mot. Et si aucun le fait, cela lui procède de pauvreté et défaut d'esprit.
La quatrième règle [veut que l'on se] contente du commun, sans innover aucunes dictions follement, et par curiosité repréhensible . Pour cela n'entends pas que je dise que traducteur s'abstienne totalement de mots qui sont hors de l'usage commun, mais cela se doit faire à l'extrême nécessité.
Venons maintenant à la cinquième règle que doit observer un bon traducteur. Laquelle est de si grande vertu, que sans elle toute composition est lourde et mal plaisante. Mais qu'est ce qu'elle contient ? Rien autre chose que l'observation des nombres oratoires : c'est asseoir une liaison et assemblement des dictions avec telle douceur, que non seulement l'âme s'en contente, mais aussi les oreilles en sont toutes ravies, et ne se fachent jamais d'une telle harmonie de langage.
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