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mercredi 29 août 2007

Sensuelle avec suite

ou l'irruption des corps dans l'édition. Dans un court billet d'information sur le blog de notre équipe (), j'ironisais stérilement sur la couverture aguichante de la traduction par Yvonne André d'un roman de Wang Anyi 王安忆[Xiaocheng zhi lian 小城之戀] sous le titre d'Amour dans une petite ville sur le point de paraître aux Editions Philippe Picquier.

Je m'étais retenu de poursuivre sur cette voie glissante, le lieu ne se prêtant pas idéalement au développement oiseux qui va suivre. J'aurais quand même pu écrire que la présentation de l'éditeur - qu'on devrait voir en quatrième de couverture et qui devrait selon toute vraisemblance constituer le seul appareil critique accompagnant l'œuvre (1) -, était à l'unisson de cet emballage d'un type nouveau puisque après avoir dûment fourni l'amorce de l'intrigue en nous promettant « l’irruption du désir et des corps à une époque où ils étaient bannis », elle ajoute (c'est moi qui souligne) :

« Ce roman qui est le premier d’une trilogie (les deux autres romans sont en cours de traduction aux Editions Picquier) parue dans les années 1986-1987 en Chine, fit scandale par la franchise avec laquelle était abordée la sexualité. C’est un texte d’une grande violence, curieusement détaché aussi, sans autre morale que celle des corps, de la puissante palpitation de la vie, qui ne connaît ni barrière, ni loi ni tabou. »

N’ayant pas lu l'ouvrage, pas plus en chinois qu’en français, j'ai aussitôt imaginé qu'il contenait quelques descriptions d'une grande sensualité qui justifiaient le choix de la photo de couverture. Mais, la lecture de la présentation proposée dans le n° 695 de Livres Hebdo par J.-M. M. (?) m’a très rapidement ramené à la raison (c'est toujours moi qui souligne) :

« On appréciera dans ce conte, le changement complet de cadre [par rapport au Chant des regrets éternels (Yvonne André, Stéphan Lévêque (trad.),Picquier, 2006)], et son art de styliste. L'impressionnante retenue de la narration laisse deviner une protestation furieuse : deux destins ont été brisés. » Plus haut, il est même question « d'une description ‘neutre’ d'une passion qui lie, dès l'adolescence, deux jeunes danseurs dans une culture où la sexualité n'existe pas (puisqu'on n'en parle pas) et où rien n'est envisageable hors mariage. »

Depuis, Noël Dutrait a tranché le débat de la manière suivante : « Une couverture qui risque de décevoir le lecteur s’il pense lire un texte érotique à la gloire de l’amour physique. » (Voir ici) On peut donc se demander si l'éditeur qui affiche son désir de défendre l'œuvre de Wang Anyi ne lui a pas une nouvelle fois joué un bien vilain tour - le premier, pour ceux qui aurait la mémoire courte, fut la publication des Lumières de Hong-Kong (2001) dont Nicolas Zufferey avait relevé les lacunes [« Les Lumières de Hong Kong et les brumes de la traduction. A propos des éditions françaises de deux romans chinois contemporains », Perspectives chinoises, n° 75 janvier - février 2003, pp. 64-70] ; le second tour pendable, serait donc de lui faire enfiler des atours qui ne lui conviennent pas.

Certes, l'image est belle - qui s'en plaindrait ? -, mais, en s'y prenant ainsi, l'éditeur prend le risque d'influencer dans une direction erronée la perception du lecteur. Accordons lui qu'il le fait … ‘en toute conscience’. Il a, en effet, réfléchi de longue date au sujet et sait quoi répondre quand on lui demande s'il attache de « l’importance à la couverture du livre, et à sa qualité en tant qu’objet ? » (voir le relevé de ses propos ici) :

La couverture doit être en résonance avec le contenu du livre. Il faut qu’il y ait concordance entre l’intérieur et l’extérieur. Valoriser l’objet avec une image. On attache de plus en plus d’importance à l’objet. Nous avions déjà cette façon de faire à nos débuts.

A la question « Demandez-vous l’avis des auteurs pour la couverture ? », il répond :

La plupart du temps, ils nous laissent faire, même si parfois ils trouvent nos couvertures moches. Ils ne disent rien mais n’en pensent pas moins. C’est extrêmement difficile quand un auteur demande un droit de regard sur la couverture, cela pose toujours problème. Nous faisons des réunions chaque mardi où nous réglons les problèmes de titre. C’est souvent difficile car la traduction ne tombe pas bien, et il nous faut trouver un titre qui respecte à la fois l’idée de l’auteur et qui soit commercial. Le traducteur donne son avis et nous lui demandons souvent de faire une liste quand nous avons un problème.

L'emballage est donc un élément crucial de la politique éditoriale de cette maison, comme de bien d'autres, pour ne pas dire de toutes. Certes, la couverture n'est pas le seul élément à prendre en considération, mais c'est néanmoins celui qui s'impose en premier au lecteur ; c'est elle qui confère au livre, nous dit-on, son statut d'objet, d'objet commercial ! Ceci se comprend naturellement, mais il y a, là sans doute aussi, des limites à ne pas franchir.

Le point est plus important qu'il peut sembler au premier abord. Pour remplacer le terme dépréciatif d' « emballage », retenu jusqu'à présent, Gérard Genette avait, voici longtemps déjà, proposé une terminologie plus adaptée, savoir « péritexte » conçu comme partie du paratexte [ce qui se trouve autour d'un texte, « c'est-à-dire toutes les données textuelles qui présentent au lecteur le texte proprement dit et peuvent fonctionner pour lui comme des seuils, des orientations, ou des pièges » [Dictionnaires des termes littéraires, Champion « Classique », 2005, p. 353.]. Dans Seuils (Paris : Seuil, "Poétique", 1987, pages 20-37), justement, il avait fourni une pertinante analyse de tous les éléments qui constituent ce qu'il appelait le péritexte éditorial, savoir « toute zone du péritexte qui se trouve sous la responsabilité directe et principale (mais non exclusive) de l'éditeur ». Vingt ans plus tard, il devient criant que la réflexion menée alors sur la couverture tourne un peu court. Elle mériterait d'être poussée plus avant, car pendant les deux décennies qui nous éloignent de la sortie de cette magistrale étude, les éditeurs ont rivalisé d'audace et d'imprudence, pour ne pas dire de légèreté.

Pour en rester au volume en question - mais la question mériterait d'être étendue à tout un corpus et compléter de celle-ci : quel type de présentation, quels péritexte et paratexte doit-on accorder aux traductions de littérature chinoise ? -, on peut s'interroger sur l'impact que va produire cette couverture - non sur les ventes, ce n'est pas notre problème -, mais sur le lecteur. L'image de Wang Anyi auprès d’un public qui ne sait pas grand chose d'elle et pas plus de son œuvre, pourrait s'en ressentir gravement. La traductrice pourrait même se sentir impliquée dans cette présentation osée.

L'effet peut-être le plus inattendu de ce péritexte (couverture, quatrième de couverture, dossier de presse, filtrage commercial, ...) sur sa diffusion est sans aucun doute sa soudaine proximité avec des ouvrages avec lesquels le roman de Wang Anyi n'aurait jamais dû devoir frayer. En effet, quoi de commun entre l'ancienne « jeune instruite » née en 1954 et Swann de Guillebon et Patrick Saint-Just, et qu'est-ce qui peut rapprocher Amour dans une petite ville de Farang (Grasset, 2004) et des Folies de Bangkok (Media 1000, collection « Les interdits », 2006) ?

La couverture, peut-être (voir notre illustration), à la réserve que celle de Wang Anyi ne figurait pas encore en ligne sur Amazon, le site de vente qui a réalisé tout seul le rapprochement de ces trois romans [sur ce tour de force voir ici]. Pourtant, comment le nier : la confrontation montre un certaine familiarité entre les couvertures des deux premiers titres, et … qu'il y a toujours pire ! Elles sont sans aucun doute le fruit de cette recherche difficile et périlleuse d'un « équilibre » entre une perception du contenu et l'efficacité commerciale.

Mais plus vraisemblablement, le responsable de ce rapprochement dérangeant pourrait bien être le contenu des résumés fournis par les éditeurs de ces trois romans. Voici pour étayer cette hypothèse et dans cet ordre, ceux de Farang et des Folies - je ne reprends pas celui d'Amour dans une petite ville :

Bangkok, nuits moites, foules affairées, poussière des soïs, dédale parmi les palais et les temples aux toits d'or. Une ville qui gronde même lorsque rien ne bouge. Mais l'étranger qui s'y perd n'entend pas la menace. Lorsque Tristan rencontre Joy, il ne sait pas que l'amour, en Thaïlande, est un processus conventionnel, impossible à contourner sans emprunter des chemins de traverse. Et quand la mafia de Chiang-Mai s'en mêle, Tristan, qui pense tout maîtriser, est dépossédé de lui-même. Qui dira à quel prix ? Même Monsieur Thran, ce fieffé innocent qui sait si bien se simplifier la vie en compliquant celle des autres, prétend ne pas connaître la fin de l'histoire. C'est pourtant lui, désormais, qui rabâche ce vieux proverbe d'Asie : « Il y a toujours deux extrémités à un bâton. »

Des vacances de rêve en Thaïlande, voilà ce que voulait Hélène, une jeune prof libérée et aventureuse. Après les plages paradisiaques, elle se fait coincer à l'aéroport de Bangkok par erreur et prolonge contre son gré son séjour dans une prison locale. Pourtant ce n'est pas l'enfer quelle découvre, mais presque une colonie de vacances peuplée de femmes prêtes à tout pour tromper leur ennui. Dans la moiteur des cellules, les prisonnières et les gardiennes s'éclatent sans tabou, et Hélène s'aperçoit qu'en prison règne une certaine liberté... sexuelle ! Entre séances coquines au parloir avec son avocat obsédé et complicité avec des Thaïlandaises pas vraiment innocentes, elle se délure au rythme des journées occupées à tromper l'attente d'une libération. Après quelques mois d'incarcération, Hélène finira même par regretter son séjour en taule, à l'ambiance bien plus chaude que bien des clubs de vacances traditionnels.

« La sexualité sans barrière, ni loi, ni tabou » des Editions Picquier, la ville - certes celle de Wang Anyi n'est pas la capitale des débordements sexuels de l'Asie, mais bon, les outils informatiques mis en jeu n’ont pas le sens de la mesure suffisamment aiguisé -, ont, au bout du compte, une certaine connivence avec les « chemins de traverses » qui sont suivis dans le Bangkok suintant le cliché, et la « liberté sexuelle » qui s'affiche dans ces productions de second, voire de troisième, rayon.

Se pose alors une question : vaut-il mieux qu'un ouvrage soit « mal lu » mais abondamment, plutôt que « peu lu » et mieux apprécié ? Et cette autre interrogation : puisqu'il y aura une suite – « deux romans en cours de traduction » - et qu'il va bien falloir bâtir une unité graphique entre les trois volumes (sans doute du même type que celle qui fut trouvé pour les deux tomes d'Un moment à Pékin de Lin Yutang) quelle surprise les Editions Picquier réservent-elles à ses aficionados ?

Au sujet des couvertures, aussi sur ce blog : "Banc d'essai".

(1) Erreur ! L'ouvrage que j'ai pu feuilleter mais guère plus d'une minute en librairie s'ouvre sur un "Avant propos" de la traductrice, soit quelque trois pages de présentation que je prendrai le temps de lire un de ces jours prochains. A suivre donc ....

vendredi 11 novembre 2005

Bis repetita

J'étais bien confiant le 28 octobre dernier en claironnant un peu vite que j’étais enfin débarrassé de Confucius et de Lin Yutang. Erreur, double erreur, car me voilà à nouveau confronté à l’un et surtout à l’autre.

Pour faire court, voici en deux mots ce qui est arrivé.

Ma préface n’a pas plu : exit donc les 25 000 signes amoureusement agencés et les quelque 4000 mots par lesquels je tentais – avec beaucoup d’indulgence - de faire la part des choses afin de permettre au lecteur attentif de mieux apprécier la nature du livre qu’il allait lire. Peine perdue !, ce n’était « pas la bonne préface pour ce livre ».

Il fallait donc en refaire une, ou plutôt faire, enfin, la « bonne » préface, ou pour dire les choses autrement une préface mieux intentionnée, voir carrément laudative, qui soit en harmonie avec la volonté de l’éditeur de « favoriser la redécouverte de Lin Yutang et de proposer une lecture de Confucius, qui, malgré toutes ses lacunes et son caractère daté, en propose une vision personnelle et susceptible d'intéresser le grand public. »

Le grand public ! Eh ! C’est que je ne l'avais pas en tête, moi, le « grand public » en rédigeant un texte que j'ai mis en ligne afin que chacun puisse juger sur pièce. Il est vrai qu’il ne vaut mieux pas lui dire n’importe quoi au « grand public », sinon ... il n’achète pas.

Ceci dit en passant, ce n’est sûrement pas la teneur un peu critique d’une préface qui peut détourner un lecteur potentiel du passage à l’acte. La quatrième de couverture me semble plus déterminante dans les choix d’une fragile poussière de « grand public » qui fréquente encore les librairies et qui garde plus de trente secondes en mains un ouvrage qu’une couverture attrayante lui aura fait distinguer entre mille.

Bah ! Il n’y a pas de quoi faire un fromage et, du reste, il y a pire tourment que de devoir remettre l’ouvrage sur l’établi ?

En fouillant dans les documents accumulés ces derniers temps sur mes deux héros, je suis tombé sur la photo de la page d’accueil du site taïwanais dédié à Lin Yutang, photo reproduite ci-contre et sur laquelle le vieil homme arbore un sourire désarmant. En le regardant aussi satisfait de lui, comment en vouloir à cet homme d’avoir pondu un si mauvais livre ?

Reste en suspens une interrogation de fond : pourquoi tous ceux de mes amis qui ont eu un livre de Lin Yutang en mains, l’ont-ils aussi franchement détesté ? Serait-ce à cause (je cite) de son ‘indécrottable misogynie’, son ’opportunisme puant’, son ‘paternalisme rétrograde’ ou seulement son ‘manque de génie littéraire’ ? Je repousse l’examen de se problème à un futur lointain, en me disant qu’un auteur qui aime Li Yu ne peut pas être si « mauvais », mais il faudra bien un jour approfondir.

Mais finissons-en avec cette Sagesse. S’il s’agit comme je le pense d’une commande d’éditeur, je ne peux décemment pas lui reprocher de l’avoir fait, puisque ma collaboration sur ce projet n’était finalement motivée que par le … profit. Comme quoi, et c’est ce que les événements actuels et la vie nous prouvent tous les jours, c’est - je ne suis pas le seul à le penser de temps en temps - Xunzi, et non Kongzi et Mengzi, qui avait raison : "l’homme est naturellement mû par l'amour du profit !" 人之性,生而有好利焉。

Il n’empêche qu’il a des manières plus agréables de passer un 11 novembre.

C’est décidé, je n’accepterai plus n’importe quoi, ou alors, il faudra y mettre le prix. Nobody’s perfect.

vendredi 28 octobre 2005

De Kong à Li

Fini, achevé, bouclé, plié, empaqueté, ficelé : ouf ! Exit Lin Yutang, exit Confucius. Vive le reste, tout le reste ....

Un peu plus de sept mois se sont écoulés depuis la création de la rubrique Confusionisme dans ce PiKaBlog. Sept mois fort occupés. Celui qui s’achève le fut quasi exclusivement au toilettage de La Sagesse de Confucius pour les Editions Philippe Picquier. J’avais en mars dernier des doutes sur la nature du projet. Maintenant, j’ai des certitudes : The Wisdom of Confucius n’est pas un bon Lin Yutang.

Avec la fin de ce marathon somme toute enrichissant (bien que fort modestement rémunérateur), j’aspire à un court repos, repos que j’estime bien mérité n’en déplaise à ceux qui liront l’ouvrage en question dans quelques semaines. Malheureusement, les conditions pour en jouir ne sont pas réunies : un nouveau site à alimenter (PiK-UP) et du retard dans la mise à disposition de cours : patience, patience, svp, merci ! Dans tous les cas, je vais mettre un peu de distance entre moi et Confucius.

Par la même occasion, s’en est peut-être fini aussi (pour un temps au moins) de cette rubrique (en tout 26 entrées, celle-ci comprise). Elle m’aura été d’un grand secours pour rédiger la préface que je viens de livrer. On y retrouve beaucoup d’éléments égrainés au fil des mois du “Confucius de ...” à cette recherche en paternité de la latinisation du nom du Maître. Ceci administre la preuve qu’on ne perd pas forcément son temps à bloguer. Au contraire, c’est un excellent moyen d’accumuler des notes (plus ou moins rédigées) qui n’attendent qu’une occasion de prendre du service dans un autre contexte. Certes, certaines rubriques n’ont pas grand-chose à livrer à la postérité, mais elles n’en constituent pas moins un utile exutoire, et à ce titre, méritent d’exister.

Puisque je veux, dès que possible, me replonger dans Li Yu, je vais devoir créer une rubrique sur mon auteur chinois préféré. Mais comment l’appeler ? Certes, il n’y a pas le feu. Le projet qui va m’occuper dans les 18 mois à venir est la traduction du Shi’er lou de cet auteur d’exception. 12 nouvelles en tout ! Un gros morceau.

samedi 1 octobre 2005

With a BIG help from my friends

J'ai sans doute tort de me réjouir des progrès accomplis dans le travail car je suis encore empêtré dans le bourbier Lin Yutang et ne suis pas prêt d'en sortir. Pouah ! Mais tout de même, les fardeaux qui pesaient sur mes épaules toutes ces dernières semaines, se sont considérablement allégés :

exit la révision des épreuves des notices pour le cinquième volume de l'Inventaire analytique et critique du conte chinois en langue vulgaire en préparation depuis ... au moins ... 15 ans ! Pour ceux que cela passionnerait le volume est consacré aux collections de contes suivantes :

Xin shi yan 型世言, Xihu jiahua 西湖佳話, Doupeng xianhua 豆棚閒話 , Wushengxi 無聲戲 et Yunxian xiao 雲仙笑.

Comptez sur moi pour signaler, le moment venu, la publication de cet ouvrage attendu depuis si longtemps. Sait-on jamais !

exit aussi les notices pour l'Encyclopedia of Erotic Literature à paraître chez Routledge. J'ai livré, ça y est, ouf !, la veille du jour présenté comme étant le dernier des derniers délais ! Les notices pour Bi Yu Lou 碧玉樓 , Yaohu yanshi 妖狐艷史 et surtout l'article sur Li Yu 李魚 et son Rou putuan 肉蒲團 sont allés rejoindre celle du Dengcao heshang zhuan 燈草和尚傳 qui avait pris les devants avec seulement deux mois de retard. Pour mémoire, l'article sur Li Yu (3300 mots) aurait dû être envoyé début mai, les autres (de 1000 mots chacun), un mois plus tard ! Bon, donc aucune raison de fanfaronner d'autant que si j'ai pu remplir mon contrat, c'est grâce à l'assistance de bons amis qui m'ont aidé à faire passer ma prose en anglais et que je tiens à remercier chaleureusement.
Or donc, merci à François V. qui a planché sur deux rubriques, Lee Mack, citoyen américain que je n'ai pas le plaisir de connaître mais qui a gentiment accepté de fignoler le Moine Mêche de Lampe, et, last but not least, Victor T., 'The Great', qui n'a pas ménagé sa peine et a fait des prouesses depuis un Hong Kong caniculaire et trépidant. Merci et bravo.
Finalement, il aura fallu, en tout et pour tout, huit mois et demi pour boucler le dossier !

Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, les concepteurs de BlogWave Studio ont refait surface, après une longue absence causée par des 'internal issues' (sic), avec la promesse de la sortie de leur 'next product' pour janvier 2006, nouveauté que les détenteurs de licence se verront offrir gracieusement. Qui vivra verra.

jeudi 22 septembre 2005

Confusedius


Voici une liste des transcriptions qu'ont reçu, d'une part, 孔子, maintenant transcrit Kongzi selon les règles du pinyin :

Coum-Tse
K'ong-tse
K'ong-tseu
K'ong-tzeu
Krong Tse

K'ung-Tse

et, d'autre part, 孔夫子 , dont le pinyin est Kongfuzi :

Cong-fou-tsé
Confucio
Confucius
Confusio
Confusius
Confutio
Confutius
Confutzée
Confuzio
Confuzo
Cumfuceio
Khoung-Fou-Tseu
Khoûng-tseu
Khoung Tzen
Konfuceo
Konfucijus
Konfusius
Konfutius
Konfutzii
Konfuzius
K'ong Fou tsé
K'ong-Fou-tse
K'ong fou-tse
K'ong fou-tseu
K'ong-fu-tseu
Kongfuzi
Kong fuzi
Krong Fu Tse
Kungfutse
K'ung Futse
K'ung Fu Tsu
K'ung Futzu
Konghucu

Le jeu consiste à retrouver la langue et/ou le (ou les) ouvrage(s) qui font usage de ces 6 + 33 différentes transcriptions. Il n'y a rien à gagner cette fois et, en plus, la liste risque de s'allonger (et oui, c'est déjà le cas grâce à Lin Yutang et à son traducteur). Un grand merci à celles et ceux qui ont déjà contribué à l'établir.

vendredi 1 avril 2005

Délicatesse chinoise

Dans La Sagesse de Confucius que je découvre en ce moment, Lin Yutang parle avec beaucoup d'enthousiasme des traductions de GU Hongming 辜鴻銘 (1857-1928) alias Kou Houng Ming, Kou-Houng-Ming ou Ku Hung-Ming, citant un ouvrage de lui que je n'ai pas encore réussi à trouver, intitulé La conduite de la vie. La référence complète serait Ku Hung Ming, The Conduct of Life: A Translation of the Doctrine of the Mean, Londres : John Murray, 1906).

J'avais à l'époque de sa réédition aux Editions de l'Aube (1996) manqué
L'esprit du peuple chinois (Traduit de l'anglais de P. Rival) qu'il composa en 1915. Il est maintenant épuisé, ce dont on pourrait se réjouir tant l'ouvrage est problématique par bien des aspects et un rien désuet. Je me rattrape en le lisant dans une édition originale (Paris : Stock, 1927) achetée à L'Opiomane. En voici un avant-goût tiré de la préface de l'auteur :

Les Américains, qu'on me permette de le dire, ne comprennent pas facilement les Chinois parce que si, dans l'ensemble, ils ont l'esprit étendu et simple, ils manquent de profondeur. Les Anglais ne peuvent pas comprendre la Chine : leur esprit est profond et simple mais il manque d'étendue. Les Allemands, eux non plus, ne peuvent pas nous comprendre car, surtout lorsqu'ils sont cultivés, ils possèdent la profondeur et l'étendue, mais n'ont pas la simplicité. Je crois que ce sont les Français qui ont le mieux compris les Chinois, qui sont le plus aptes à apprécier la civilisation chinoise. Les Français, il est vrai, n'ont pas la profondeur des Allemands, ni la largeur d'esprit des Américains ni la simplicité des Anglais ; mais ils ont à un degré tout à fait supérieur une qualité qui manque aux trois autres peuples que nous avons mentionnés, une qualité nécessaire avant tout pour comprendre la Chine, c'est la délicatesse. Car aux trois traits principaux de la civilisation chinoise, je dois en ajouter un quatrième, la délicatesse, qui est le plus caractéristique. Cette délicatesse, les Chinois la possèdent à un degré si éminent qu'on n'en trouve nulle part l'équivalent, excepté peut-être chez les anciens Grecs.
D'après ce que j'ai dit, on peut comprendre que les Américains, s'ils étudient la civilisation chinoise, manqueront de profondeur, que les Anglais manqueront de largeur d'esprit, et les Allemands de simplicité et qu'en outre ces trois peuples manqueront d’une qualité qu'ils ne possèdent pas à un degré éminent : la
délicatesse. Quant aux Français, ils manqueront tout à la fois de profondeur, de largeur d'esprit et de simplicité ; ils manqueront même d'une certaine délicatesse d'un ordre encore supérieur à celle qu'ils possèdent actuellement. Aussi, je suis amené à penser que l'étude de la civilisation et de la littérature chinoises sera certainement profitable à tous les peuples d'Europe et d'Amérique.

Le préfacier, l'écrivain et historien antifasciste italien, Guglielmo Ferrero (1871-1942), a trouvé une jolie formule pour parler de Gu Hongming. C'est, écrit-il, un "fort révulsif moral", qui "connaît ce qu'il déteste", pour avoir longtemps vécu en Europe. C'est, ajoute-t-il, un "Vieux-Chinois" ; c'est-à-dire un traditionaliste, un fidèle de l'ancienne Chine monarchiste et confucienne (sic !), un ennemi de l'occident et de la civilisation occidentale", dont l'érudition bien qu'excetionnelle, "présente certaines lacunes et imperfections". Toujours très mesuré dans sa critique, Ferrero ne peut faire moins que de l'accuser de "simplifier trop en parlant de notre histoire", et pour résumer de forcer le trait. Il conclut son intervention par ces deux phrases qui laisse dubitatif : "Je recommande la lecture de ce petit livre lumineux et profond. Il a été écrit par un Chinois qui, au fond de son âme, considère les Européens et les Américains comme des barbares ; et son esprit critique a été aiguisé encore davantage par les malheurs de son pays."

De son côté, Lin Yutang fait l'éloge de la traduction par Gu du Zhongyong (Invariable Milieu), qu'il reprend dans sa Sagesse de Confucius :

"[Elle] est si brillante et si pénétrante qu’il est regrettable qu’il n’en ait pas fait d’autre, car elle rend la pensée de Confucius parfaitement intelligible à l’homme moderne. Toutefois, j’ai jugé préférable de supprimer son propre commentaire qui fait appel à Goethe [(1749-1832)], Matthew Arnold [(1822-1888)] et aux « Livre des Proverbes »de la Bible pour élucider le sens de cette philosophie. ... Je me suis permis également d’apporter quelques corrections aux passages où Gu s’écarte du texte chinois ; en outre, je ne souscris pas au plan qu’il a adopté pour ce chapitre et j’y ai substitué le mien. D’une façon générale, je me suis abstenu de tout commentaire et je me suis borné à établir des subdivisions munies de titres capables de guider le lecteur dans l’exposition et le développement des idées. Mais les commentaires sont implicitement contenus dans la traduction et je considère une traduction de ce genre comme une sorte de commentaire, car il ne peut y avoir de traduction intelligente si le traducteur ne cherche pas à interpréter le texte. Cette remarque vaut tout spécialement pour une traduction d’un texte chinois ancien en anglais moderne. Premièrement, les mots employés ont forcément une signification générale très différente, et en second lieu les textes anciens, bien qu’extrêmement nets et concis, revêtent par endroits un caractère ambigu, si bien qu’il faut ajouter des mots de liaison et d’autres, indispensables à la syntaxe d’une langue occidentale. En outre, les interprétations chinoises du même texte varient profondément, de sorte que le traducteur doit faire son choix ou proposer la sienne, lorsqu’il est sûr d’avoir une conception nouvelle du sujet. Je me suis donc abstenu de commentaires à la manière de Gu Hongming, sauf lorsqu’ils étaient absolument nécessaires à la compréhension de certaines idées et de certains termes."

Mais Gu n'était pas qu'un conservateur raciste, c'était aussi un amateur de pieds bandés. Mais, on en reparlera un de ces jours prochains.

vendredi 18 mars 2005

Esprit es-tu là ?

Nouveau dilemme :

comment répondre à la gentille proposition des Editions Picquier d'accomplir pour leur compte le même travail de révision que pour L'importance de vivre sur la traduction française de The Wisdom of Confucius de Lin Yutang ?

La réponse est délicate sans avoir relu l'ouvrage (1939) et sa traduction (1948), surtout après avoir trouvé sur le net la critique suivante :

A disastrous work that perpetuates misinformation about Confucius' life, strips the numbering off the Analects, loses half of them and throws the rest into a jumbled order presumably meant to read as a flowing narrative. Includes contemporary language, but many terms and phrases are badly chosen and clash with the overall tone of the work. Some passages are badly distorted ; most of them read like dubbed dialogue in a martial-arts movie. Not recommended for anyone or anything, except as an example of what not to do.

Qui a dit chiche ?