J'étais bien confiant le 28 octobre dernier en claironnant un peu vite que j’étais enfin débarrassé de Confucius et de Lin Yutang. Erreur, double erreur, car me voilà à nouveau confronté à l’un et surtout à l’autre.
Pour faire court, voici en deux mots ce qui est arrivé.
Ma préface n’a pas plu : exit donc les 25 000 signes amoureusement agencés et les quelque 4000 mots par lesquels je tentais – avec beaucoup d’indulgence - de faire la part des choses afin de permettre au lecteur attentif de mieux apprécier la nature du livre qu’il allait lire. Peine perdue !, ce n’était « pas la bonne préface pour ce livre ».
Il fallait donc en refaire une, ou plutôt faire, enfin, la « bonne » préface, ou pour dire les choses autrement une préface mieux intentionnée, voir carrément laudative, qui soit en harmonie avec la volonté de l’éditeur de « favoriser la redécouverte de Lin Yutang et de proposer une lecture de Confucius, qui, malgré toutes ses lacunes et son caractère daté, en propose une vision personnelle et susceptible d'intéresser le grand public. »
Le grand public ! Eh ! C’est que je ne l'avais pas en tête, moi, le « grand public » en rédigeant un texte que j'ai mis en ligne afin que chacun puisse juger sur pièce. Il est vrai qu’il ne vaut mieux pas lui dire n’importe quoi au « grand public », sinon ... il n’achète pas.
Ceci dit en passant, ce n’est sûrement pas la teneur un peu critique d’une préface qui peut détourner un lecteur potentiel du passage à l’acte. La quatrième de couverture me semble plus déterminante dans les choix d’une fragile poussière de « grand public » qui fréquente encore les librairies et qui garde plus de trente secondes en mains un ouvrage qu’une couverture attrayante lui aura fait distinguer entre mille.
Bah ! Il n’y a pas de quoi faire un fromage et, du reste, il y a pire tourment que de devoir remettre l’ouvrage sur l’établi ?
En fouillant dans les documents accumulés ces derniers temps sur mes deux héros, je suis tombé sur la photo de la page d’accueil du site taïwanais dédié à Lin Yutang, photo reproduite ci-contre et sur laquelle le vieil homme arbore un sourire désarmant. En le regardant aussi satisfait de lui, comment en vouloir à cet homme d’avoir pondu un si mauvais livre ?
Reste en suspens une interrogation de fond : pourquoi tous ceux de mes amis qui ont eu un livre de Lin Yutang en mains, l’ont-ils aussi franchement détesté ? Serait-ce à cause (je cite) de son ‘indécrottable misogynie’, son ’opportunisme puant’, son ‘paternalisme rétrograde’ ou seulement son ‘manque de génie littéraire’ ? Je repousse l’examen de se problème à un futur lointain, en me disant qu’un auteur qui aime Li Yu ne peut pas être si « mauvais », mais il faudra bien un jour approfondir.
Mais finissons-en avec cette Sagesse. S’il s’agit comme je le pense d’une commande d’éditeur, je ne peux décemment pas lui reprocher de l’avoir fait, puisque ma collaboration sur ce projet n’était finalement motivée que par le … profit. Comme quoi, et c’est ce que les événements actuels et la vie nous prouvent tous les jours, c’est - je ne suis pas le seul à le penser de temps en temps - Xunzi, et non Kongzi et Mengzi, qui avait raison : "l’homme est naturellement mû par l'amour du profit !" 人之性,生而有好利焉。
Il n’empêche qu’il a des manières plus agréables de passer un 11 novembre.
C’est décidé, je n’accepterai plus n’importe quoi, ou alors, il faudra y mettre le prix. Nobody’s perfect.
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