Dans la série "Le Confucius de ..." voici celui de Voltaire (1694-1778)
1. d'après Le Philosophe ignorant (1766), chapitre XLI. "De Confucius" :
Les Chinois n'eurent aucune superstition, aucun charlatanisme à se reprocher comme les autres peuples. Le gouvernement chinois montrait aux hommes, il y a fort au delà de quatre mille ans, et leur montre encore qu'on peut les régir sans les tromper ; que ce n'est pas par le mensonge qu'on sert le Dieu de vérité ; que la superstition est non seulement inutile, mais nuisible à la religion. Jamais l'adoration de Dieu ne fut si pure et si sainte qu'à la Chine (à la révélation près). Je ne parle pas des sectes du peuple, je parle de la religion du prince, de celle de tous les tribunaux et de tout ce qui n'est pas populace. Quelle est la religion de tous les honnêtes gens à la Chine, depuis tant de siècles ? La voici : Adorez le ciel, et soyez juste. Aucun empereur n'en a eu d'autre.
On place souvent le grand Confutzée, que nous nommons Confucius, parmi les anciens législateurs, parmi les fondateurs de religions : c'est une grande inadvertance. Confutzée est très moderne ; il ne vivait que six cent cinquante ans avant notre ère. Jamais il n'institua aucun culte, aucun rite ; jamais il ne se dit ni inspiré ni prophète ; il ne fit que rassembler en un corps les anciennes lois de la morale.
Il invite les hommes à pardonner les injures et à ne se souvenir que des bienfaits,
A veiller sans cesse sur soi-même, à corriger aujourd'hui les fautes d'hier ;
A réprimer ses passions, et à cultiver l'amitié ; à donner sans faste, et à ne recevoir que l'extrême nécessaire sans bassesse.
Il ne dit point qu'il ne faut pas faire à autrui ce que nous ne voulons pas qu'on fasse à nous-mêmes : ce n'est que défendre le mal ; il fait plus, il recommande le bien : « Traite autrui comme tu veux qu'on te traite. »
Il enseigne non seulement la modestie, mais encore l'humilité ; il recommande toutes les vertus.
2. d'après le Dictionnaire Philosophique, rubrique "Philosophe" :
Par quelle fatalité, honteuse peut-être pour les peuples occidentaux, faut-il aller au bout de l'Orient pour trouver un sage simple, sans faste, sans imposture, qui enseignait aux hommes à vivre heureux six cents ans avant notre ère vulgaire, dans un temps où tout le Septentrion ignorait l'usage des lettres, et où les Grecs commençaient à peine à se distinguer par la sagesse ? Ce sage est Confucius, qui étant législateur ne voulut jamais tromper les hommes. Quelle plus belle règle de conduite a-t-on jamais donnée depuis lui dans la terre entière ?
« Réglez un État comme vous réglez une famille ; on ne peut bien gouverner sa famille qu'en lui donnant l’exemple.
« La vertu doit être commune au laboureur et au monarque.
« Occupe-toi du soin de prévenir les crimes pour diminuer le soin de les punir.
« Sous les bons rois Yao et Xu, les Chinois furent bons ; sous les mauvais rois Kie et Chu, ils furent méchants.
« Fais à autrui comme à toi-même.
« Aime les hommes en général ; mais chéris les gens de bien. Oublie les injures, et jamais les bienfaits.
« J'ai vu des hommes incapables de sciences, je n'en ai jamais vu incapables de vertus. »
Avouons qu’il n'est point de législateur qui ait annoncé des vérités plus utiles au genre humain.
Ces extraits proviennent du site Oeuvres complètes de Voltaire.
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