mardi 30 janvier 2007

47 ?

En ce jour anniversaire - le mien et le 59ème de la mort du Mahatma Gandhi (1869-1948) - , je vous invite à écouter un morceau de musique qui s'impose pour un chiffre qui interroge :

• la musique est de Charles Ives (1874-1954) et s'intitule The Unanswered Question. Pour en savoir plus sur ce morceau datant de 1906, il faut consulter "A Descriptive Catalogue of The Music of Charles Ives". Ailleurs, on nous dit que "Charles Ives's "Unanswered Question" was the first piece of the 20th Century using spatial separation as a major element of the composition. He specified three groups of instruments to be placed around the concert hall, or even off-stage. One, a solo trumpet, keeps asking the eternal question; the second, increasingly irate and jabbering winds, tries to respond; and the third, a soothing background of soft strings represents the constant harmony of the universe" et l'on peut aussi s'amuser avec un 'inaural 3D positioning software to move the musical parts around in an imaginary hall' ! Pourquoi se priver ?

• l'illustration provient d'un site de circonstance, portant le nom énigmatique de The 47 Society

Rien à ajouter, sinon cette citation empruntée au grand Jean de La Bruyère (16 août 1645 - 10 mai 1696), mort "célibataire et pauvre", "d'une attaque d'apoplexie", à seulement 50 ans :

Celui qui continue de cacher son âge pense enfin lui-même être aussi jeune qu'il veut le faire croire aux autres.

samedi 13 janvier 2007

En travaux

Tous ceux qui ont la chance de se rendre fréquemment à Pékin peuvent voir la ville se transformer à la vitesse grand V. Ce ne sont pas seulement les vieux hutong qui laissent la place à des constructions modernes. Les sites historiques font également peau neuve pour accueillir le flot des touristes attendus en 2008. Les grands monuments font bien naturellement l'objet des plus vives attentions. C'est aussi vrai des sites moins prestigieux. La comparaison des deux clichés ci-contre, pris à plus de trois mois d'intervale [respectivement le 19/09/06 et le 1/01/07] donnent une idée des transformations que subit en ce moment le Guozijian (Collège impérial) de Pékin. C'en est sans doute bientôt fini du charme désuet de ce lieu encore fort peu fréquenté.

Le Kong miao est lui aussi en pleine restauration. C'est bien mérité car, comme le Collège voisin, le Temple de Confucius avait besoin d'un sérieux coup de pinceau. Pour l'heure, on ne peut que s'incliner devant les statuts du Maître de Qufu et on doit attendre la fin de l'année pour y faire à nouveau brûler l'encens d'offrande.

Si l'on se fie au regain d'intérêt pour Confucius, le lieu devrait voir s'y presser en masse le public chinois qui s'entousiasme pour les émissions et les écrits qui vulgarisent la pensée du Maître. Le dernier numéro du Sanlian shenghuo zhoukan 三联生活周刊 (Life week) lui consacre du reste un dossier [子曰——从南怀瑾到于丹的通俗路径] et lui réserve sa couverture. Danwei n'a pas manqué de noter la sortie de ce numéro dans un billet intitulé "What Confucius said".

A noter que Yu Dan 于丹 se place, toujours en ce début d'année 2007, et ce depuis quelques semaines déjà, en première position des meilleures ventes de livres à Pékin avec un ouvrage sur le Lunyu 《论语》[savoir《〈论语〉心得》]. Elle y trône juste devant Liu Xinwu 刘心武 qui s'y trouve, quant à lui, pour des écrits sur Hongloumeng 《红楼梦》lequel tient, pour sa part, la sixième position dans les ventes de romans ! La Chine est vraiment surprenante ! Qui - à part quelques hurluberlus idéalistes -, aurait parié un kopec sur le renouveau des études classiques, il y a vingt ans ? Il est vrai que ce regain se fait en empruntant des voies parfois bien surprenantes : voir à ce sujet cet autre billet de Danwei ou aller directement consulter ce billet (en chinois) déposé par Wang Xiaofeng 王小峰 (rédacteur au Life Week) sur son blog personnel. Il s'agit d'un Lunyu xinde 《论语》新得 aussi désopilant que peu respectueux du Maître et de ses prosélytes modernes.

lundi 18 décembre 2006

No comment

Au rythme où je me penche sur ce blog, je pense que ce billet sera le dernier de 2006. C'est aussi le centième. Pour finir cette année en beauté, je reproduis ici un courrier reçu ce jour. Il ne nécessite aucun commentaire. Le voici donc dans sa rafraîchissante spontanéité, mais débarrassé de toute marque permettant d'identifier son auteur(e), et, qui plus est, accompagné de tous mes vœux :

Cher Monsieur,

Quelle joie de trouver vos coordonnées grâce à un ami, Xxxxx Xxxxxx, qui s'occupe du "rayon" Chine ancienne sur le site de l'université de Xxxxxx au Xxxxxx ! J'habite à St xxxxx xxx xxxxx à côté de Xxxxxx et j'ai fait mes études à X. Or, ne voilà-t-il pas que j'ai entrepris d'écrire un roman sur la vie de Confucius!
Et je voulais savoir quelle était la date officielle de la naissance de ce cher grand homme. Xxxxx, en cherchant, est tombé sur votre site. Quelle merveille cela peut être pour moi, si cela ne vous ennuie pas, de vous poser
des questions sur cette époque passionnante. Mais ce petit mot n'est qu'un premier pas pour faire votre connaissance. Je vous parlerai ensuite de mon projet qui a pour titre "Xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx." car j'en suis à la page 200 environ et confucius n'est pas encore né! L'arrière plan féodal et tous les personnages que l'on découvre dans le Tchouen ts'iou et beaucoup d'autres textes que j'ai téléchargés!, est pour moi une mine inépuisable! Bref j'envisage d'être le Walter Scott de Confucius car j'ai évidemment de ce grand homme un peu coincé une vision plus romanesque; je ne voudrais pas, cependant, tout en gardant ma liberté de romancière farfelue, proposer des non-sens.Il est bien évident que ce que l'on sait de Confucius ne compose que de petits pointillés et que j'ai envie parce que sa générosité anti-taoïste ne peut être que saluée (vouloir s'occuper des autres, quel admirable choix mais si pesant!), lui composer un long portrait plein d'amour et de fantaisie. Pourquoi me suis-je intéressée à Confucius? Vraiment, on se le demande car, il y a encore quelques années je savais tout juste où la Chine se trouve sur le globe terrestre!
J'espère que vous pourrez me consacrer quelques atomes de votre temps précieux!
Amicalement.Xxxxx Xxxxxxx.

'No comment' (suite). Ma réponse à la précédente missive a suscité un nouvel envoi que voici :

Merci beaucoup de votre rapide réponse. J'ai lu,en effet par curiosité, tous les romans sortis sur Confucius et ils sont gravement nuls. Ce qui est la fois un bien et un mal puisque cela signifie que je n'ai à craindre aucun concurrent... parce que la tâche est ardue.. J'ai lu le "Confucius" de Lévi. Je lui ai même emprunté l'idée de faire de la mère de Confucius une chamanesse, ce qui m'a permis d'inventer une scène de danse du dragon hautement sexy. Quant à la date de naissance du grand homme, il faut bien qu'il naisse un jour donné, je tiens à ce que cela se passe neuf mois après le printemps car, j'imagine sa conception lors d'une fête à la Granet, suivi d'un petit tour sur la colline N'qiu!
Merci encore. Amicalement. Xxxxxx.

vendredi 1 décembre 2006

Supprimer l'auteur

La commande en ligne de livres est rendue d'autant plus indispensable qu'on habite loin d'une véritable librairie. Amazon s'impose comme l'interlocuteur idéal : choix immense, rapidité et efficacité, voire même parfois gratuité, du service. Disposer dans un temps assez court de livres inaccessibles à Marseille est, pour moi, largement suffisant, mais la société offre plus et multiplie les services inutiles. A quoi bon cet onglet qui ouvre une page pompeusement appelée "Chez Kaser", page qui me renvoie un écho déformé des achats déjà réalisés, avec des propositions en phase avec mes goûts supposés. Quand celui - ou celle - qui commande un livre de Jean Lévi se voit proposer, quasi magiquement, le Contre François Jullien de Jean-François Billeter (Allia, 2006), ce sont plus de 90 % des suggestions qui tombent à plat.

Mais le génie d'Amazon ne s'arrête pas là puisqu'une commande [voir illustration] permet de réaliser le rêve de la critique littéraire du siècle passé, savoir "supprimer l'auteur". N'en font-ils pas un peu trop ?

Bon trêve de plaisanterie. Il est certes rageant de vivre loin des bonnes librairies, mais encore plus de se trouver à 773,4 km du Collège de FranceAntoine Compagnon donnait hier sa leçon inaugurale. Le provincial n'a plus qu'à se satisfaire des rares échos de l'événement (ici et ) et à attendre patiemment qu'Amazon mette à sa disposition la publication de la dite leçon et les prochaines publications de celui qui occupe dorénavant la chaire de Littérature moderne et contemporaine : Histoire, critique, théorie de la prestigieuse institution qui est encore à mille lieux de podcaster ses cours !

samedi 25 novembre 2006

Le retour de Li Si

Li Si 李斯 est de retour. Certes, le Li Si qui fait parler de lui ces derniers temps n'est pas celui qui étudia en compagnie de Han Fei 韓非 sous la férule du grand Xunzi 荀子 avant d'aller à Qin 秦 pour y devenir le redoutable Premier ministre du roi Zheng 政 qu'il aida à conquérir les principautés voisines pour unifier la Chine, avant de finir tronçonné à la taille en 208 av. J.-C. Ce n'est pas celui qui est à l'origine de l'autodafé par lequel Qin Shihuang 秦始皇, le Premier Empereur, proscrivit, en - 213, la possession privée d'un certain nombre d'ouvrages, parmi lesquels les Classiques du confucianisme, comme le raconte Sima Qian 司馬遷 dans le Shiji 史記 (Mémoires historiques. Traduction d'Edouard Chavannes (1865-1918), numérisée ici par Pierre Palpant : pour le passage en question, voir tome 2, p. 57-58) :

Le conseiller, votre sujet (Li) Se, se dissimulant qu’il s’expose à la mort, dit : Dans l’antiquité, l’empire était morcelé et troublé ; il ne se trouvait personne qui pût l’unifier ; c’est pourquoi les seigneurs régnaient simultanément. Dans leurs propos, (les lettrés) parlent tous de l’antiquité afin de dénigrer le temps présent ; ils colorent des faussetés afin de mettre la confusion dans ce qui est réel : ces hommes font valoir l’excellence de ce qu’ils ont appris dans leur études privées afin de dénigrer ce qu’a institué Votre Majesté. Maintenant que le souverain empereur possède l’empire dans son ensemble, qu’il a distingué le noir du blanc et qu’il a imposé l’unité, ils mettent en honneur leurs études privées et tiennent des conciliabules. Ces hommes qui condamnent les lois et les instructions, dès qu’ils apprennent qu’un édit a été rendu, s’empressent de le discuter chacun d’après ses propres principes ; lorsqu’ils sont à la cour, ils désapprouvent dans leur for intérieur ; lorsqu’ils en sont sortis, ils délibèrent dans les rues ; louer le souverain, ils estiment que c’est (chercher) la réputation ; s’attacher à des principes extraordinaires, ils pensent que c’est le plus haut mérite ; ils entraînent le bas peuple à forger des calomnies. Les choses étant ainsi, si on ne s’y oppose pas, alors en haut la situation du souverain s’abaissera, tandis qu’en bas les associations se fortifieront. Il est utile de porter une défense. Votre sujet propose que les histoires officielles, à l’exception des Mémoires de Ts’in, soient toutes brûlées ; sauf les personnes qui ont la charge de lettrés au vaste savoir, ceux qui dans l’empire se permettent de cacher le Che (king) [Shijing], le Chou (king) [Shujing], ou les discours des Cent écoles, devront tous aller auprès des autorités locales civiles et militaires pour qu’elles les brûlent. Ceux qui oseront discuter entre eux sur le Che (king) et le Chou (king) seront (mis à mort et leurs cadavres) exposés sur la place publique ; ceux qui se serviront de l’antiquité pour dénigrer les temps modernes seront mis à mort avec leur parenté. Les fonctionnaires qui verront ou apprendront (que des personnes contreviennent à cet ordre), et qui ne les dénonceront pas, seront impliqués dans leur crime. Trente jours après que l’édit aura été rendu, ceux qui n’auront pas brûlé (leurs livres) seront marqués et envoyés aux travaux forcés. Les livres qui ne seront pas proscrits seront ceux de médecine et de pharmacie, de divination par la tortue et l’achillée, d’agriculture et d’arboriculture. Quant à ceux qui désireront étudier les lois et les ordonnances, qu’ils prennent pour maîtres les fonctionnaires. Le décret fut : « Approuvé. »

Non, celui qui a choisi ce nom si longtemps détesté, celui qui fait dresser les cheveux sur la tête de Xu Jiajun 許嘉俊, journaliste au Wenhui dushu zhoubao 文匯讀書周報, a beaucoup moins à se faire pardonner que le pourfendeur des confucéens d'antan. En effet, loin d'avoir fait brûler des livres, il signe une entreprise de multiplication de textes, devenant du coup le chantre de la traduction du chinois au chinois “中譯中” en signant seul la traduction chinoise d'une pléthorique collection publiée en octobre 2006 à Changchun (Province de Jilin) par les éditions Shidai wenyi 時代文藝, ensemble composé de 26 tomes intitulé Nuobei'er wenxuejiang wenji 諾貝爾文學獎文集 soit Collection d'œuvres des Prix Nobel de Littérature, vaste choix qui implique des écrivains issus de pas moins de 12 pays différents.

A en croire Xu Jiajun, lequel dénonce par ailleurs le plagiat éhonté d'un ouvrage consacré par le même homme à la Beat Generation, Li Si s'est contenté de reprendre en les modifiant très légèrement, voire même fautivement, des traductions déjà existantes. Il a donc, sinon inventé, pour le moins abondamment pratiqué, la traduction à valeur négative dépassant par le bas le degré zéro de la traduction. Bien évidemment, les romans de Gao Xingjian n'ont pas été intégrés dans ce choix. Si cela avait été possible, Li Si les aurait sans aucun doute dûment "traduits".

Le site Danwei offre sur ce sujet la traduction d'articles, ainsi que les liens dirigeant vers quelques uns des articles chinois qui ont révélé et commenté l'escroquerie (>> ici <<).

vendredi 24 novembre 2006

Adonaissant

Le 26 mai 2005, je m'en prenais, un peu rapidement et sans trop y réfléchir, aux dérapages de mes étudiants d'alors en relevant quelques-uns de leurs écarts de langages, "perles" d'une session d'examens assez banale. J'avais alors noté ce passage :

... l'héroïne adonaissante se voit contraint de se marier à un enfant de deux ans. ...

Je dois reconnaître aujourd'hui qu'il y avait dans cet enrichissement lexical, sans doute involontaire, une géniale intuition. C'est ce dont je me suis rendu compte en découvrant en librairie le dernier opus de François de Singly qui porte justement pour titre Les adonaissants (Armand Colin, "Individu et Société", 2006. Voir la Table des matières) ouvrage destiné à un "public cultivé" selon l'éditeur. Le commentaire suivant explique comment l'auteur entend le concept qu'il a forgé et qu'il compte bien faire accepter à la communauté savante :

L'adonaissance, voici une notion nouvelle et nécessaire pour désigner cette réalité moderne : les jeunes grandissent plus tôt et différemment. Les adultes le comprennent mal et ne savent pas comment y faire face. .../... Les jeunes n'attendent plus la "crise d'adolescence" pour s'affirmer. Ils le font dès l'entrée au collège, dès 10-11 ans. Mais attention ! .../... Ces adonaissants ne se donnent pas le mot pour être des "tyranneaux domestiques" commandant des parents sans autorité. Plutôt bien intégrés dans la vie de famille et ses contraintes, ils s'individualisent en douceur, ils s'émancipent en prenant appui sur les codes culturels de leur génération. Ils sont déjà "ailleurs" quand on les croit encore "là". Ils apprennent à avoir un certain pouvoir sur eux-mêmes. Alors comment se comporter face à ce mouvement d'individualisation précoce qui peut créer un réel désarroi, un sentiment de perte d'emprise des parents sur leurs adonaissants ? Comment accompagner sans intrusion, comment respecter l'exigence d'autonomie sans s'installer dans une sorte d'apartheid - adultes d'un côté, enfants de l'autre - qui couperait court à toute possibilité de transmission ?

De fait, autant qu'on puisse en juger en interrogeant le net, le terme connaît un rapide succès. Déjà les blogueurs s'en sont emparés (voir ici, ou encore ) et il figure dorénavant dans le vocabulaire des participants à toutes sortes de forums (comme ici, , ou encore ) et aussi des journalistes (ici et ), voire même des "critiques littéraires" (ici). Pourtant, le terme, et son dérivé adonaissance, n'est guère plus séduisant que le préado et la préadolescence d'antan. Si son créateur l'a préféré à adonescent et adonescence, c'est sans doute pour éviter de marcher sur les plates-bandes des inventeurs de l'horrible "adulescent", terme douteux apparu dans la foulée du disgracieux "bobo", du grossier "papyboomer" et du repoussant "célibattante" ! Certes, il n'y a pas de quoi faire un fromage.

En illustration : La Charité (ap. 1536) tableau attribué selon les époques à Lucas Cranach le Vieux (1472-1553) ou à Lucas Cranach le Jeune (1515-1586)

Complément du 03/02/07 :

Il est motivé par la lecture de Bardadrac (Editions du Seuil, "Fiction & Cie", 2006, 453 p.) dans lequel Gérard Genette dresse une liste de quelque 150 "mots-chimères" [pp. 287-295] dont "Adonaissant. Pré-ado" et "Adulescent. Post-ado" (p. 289). Page 288, il explique le pourquoi de cette appellation :

Mot-chimère, puisqu'une chimère est un monstre produit par greffe - tête de lion sur corps de chèvre, etc. On pourrait aussi bien, ou pas plus mal, les qualifier de mots écrasés, mais ne prenons pas trop de risques inutiles.

La liste commence par Abbécédaire. Précepteur ecclésiastique ; Accro-alimentaire. Boulimique incurable et accumule les trouvailles telles que : Anarchiviste. Bibliothécaire bordélique ; Anarcisse. Libertaire égocentrique ; Maîtronome. Chef d'orchestre exclusivement respectueux du tempo ; Réciproquo. Double méprise ou encore Sarkome. Tumeur à droite.

Pour ma part, je propose : Japoniaise pour Vedette de la télévision nippone, mot-chimère qui a naturellement son masculin Japoniais.

mercredi 11 octobre 2006

9781579584412

9781579584412 est l'ISBN de l'Encyclopedia of Erotic Literature, éditée par Gaëtan Brulotte et John Phillips qui vient de paraître chez Routledge (New York et Londres). Elle coûte pas moins de 289 € sur Amazon.fr, 321 € sur la version allemande du fameux site de vente par internet, 202 £ sur l'anglaise, 285 $ sur l'américaine, 47.123 Yen sur la japonaise et 277 CDN$ sur la canadienne.

L'ouvrage est publié en deux beaux et gros volumes : le volume 1 couvre les lettres A à K, soit d'Abélard and Héloïse au russe Mikhail Kuzmin (1872-1936) ; le volume 2, la fin de l'alphabet, soit de L. Erectus Mentulus (Lupton Allemong Wilkinson, c. 1900-1993) à notre bon Emile Zola (1840-1902). Chaque volume présente le même index de 203 pages et est précédé de 36 pages proposant une introduction, la liste des auteurs et celle des quelque 500 entrées (formatée en essais de 1000 à 8000 mots). Le texte présenté sur deux colonnes court sur 1468 pages.

La littérature chinoise y est traitée en 27 articles dont voici le détail (avec le cas échéant, une ou deux informations sur le contenu, ainsi que le nom de l'auteur de la notice) :

1/ Admirable Discourses of the Plain Girl : pp. 7-8. Le Sunü miaolun présenté par André Lévy (Université de Bordeaux) qui l'a traduit sous le titre Le sublime discours de la fille candide (Picquier, "Pavillon des corps curieux", 2000).
2/ Art of the Bedchamber Literature : pp. 78-83. Long article de Douglas Wile (Brooklyn College CUNY), auteur de Art of the bedchamber : The Chinese Sexual Yoga Classics (Albany, NY : SUNY, 1992) dont il fournit là une utile synthèse.
3/ Bai Xingjian : pp. 101-102. Frère du poète Bai Juyi, Bai Xingjian (?-826) est crédité par Douglas Wile du Tiandi yinyang jiaohuan dale fu [Prose Poem on the Supreme Joy of the Sexual Union of Yin and yang, Heaven and Earth].
4/ Ban Jieyu : pp. 108-109. Poètesse chinoise ayant vécu vers - 48 jusqu'à 8 av. J.-C., créditée de deux fu et dont l'œuvre est présentée par Claude Fouillade (New Mexico State University).
5/ Bi Yu Lou [The Jades Pavilion] : pp. 141-143. Le pavillon des jades (Picquier, "Le Pavillon des corps curieux", 2003) par son traducteur (PK, Université de Provence).
6/ Books of Odes [Shih-Ching] : pp. 153-154. Le Shijing par Olivia Milburn (University of London).
7/
Cao Xueqin (1715-1764) : pp. 200-201. L'auteur du Hongloumeng et son œuvre par Andrew Schonebaum (Barnard College).
8/ Collected Writings of Fragant Elegance
: pp. 267-271. Long article d'André Lévy sur la collection Xiangyan congshu élaborée par un certain Zhang Tinghua au début du XXe siècle.
9/ Deng Xixian : pp. 331-332. Le Zijin guangya da xian xiuzhen yanyi et son auteur - un "Chinese sexual alchemy writer" mort après 1594 -, présentés par A. Lévy.
10/ Dengcao heshang zhuan [The Candlewick Monk] : pp. 332-334. Le Moine mèche de lampe (Picquier, "Le Pavillon des corps curieux", 1998), par son traducteur (PK).
11/ Ge Hong (283-343) : pp. 527-528. Excellent article de Philippe Che (Université de Provence) sur l'auteur qu'il a déjà présenté et traduit en français (La voie des divins immortels, Gallimard, "Connaissance de l'Orient", 1999).
12/ Huang : pp. 647-648. Xia Tingshi (1316-1368), alias Huang à qui l'on doit le Qinglouji - anthologie de portraits de chanteuses/actrices -, présentés par A. Lévy.
13/ Jin Ping Mei [Plum in the Golden Vase] and Gelian Huaying [Flower Shadows behind the Curtain] : pp. 698-702. Article non signé (!) sur le meilleur des Quatre romans extraordinaires des Ming et sa suite.
14/ Jingu qiguan [The Oil Vendor Who Conquers the Queen of Beauty] : pp. 702-703. Présentation par A. Lévy de la fameuse anthologie de contes du XVIIe siècle et d'un de ses chefs-d'œuvre, avec une référence au conte qu'en a tiré Li Yu (1611-1680) et à la traduction que j'en ai donné sous le titre de "Reine de cupidité".
15/ Li Yu : pp. 809-813. Li Yu (1611-1680), ses contes, ses nouvelles et son roman, Rouputuan [Chair, tapis de prière], par votre serviteur (PK).
16/ Lü Dongbin : pp. 836-837. Lü Yan (755-805) pour le Chunyang yanzheng fuyou dijun jiji zhiming par A. Lévy.
17/ Lü T'ian-chêng : pp. 837-839. L'auteur, Lü Tiancheng (vers 1580 - vers 1620), et le roman Xiuta yeshi présentés par A. Lévy qui oublie de signaler que le roman a été traduit en français : Histoire hétérodoxe d'un lit brodé (Huang San, Lionel Epstein (trad.), Picquier, 1997).
18/ Mao Xiang (1611-1693) : pp. 857-858. D. Wile s'attache au Yingmei'an yiyu que M. Vallette-Hémery a rendu en français sous le titre de La Dame aux pruniers ombreux (Picquier, 1992)
19/ Sexual Alchemy Literature, Chinese : pp. 1208-1210. Douglas Wile, à nouveau.
20/ Shangqing Huangshu Guoduyi [Yellow Book Salvation Ritual of Highest Purity] : pp. 1218-1220. Douglas Wile, encore.
21/ Sun Wei (Xe s.) : pp. 1261-1262. Pour ses Shennü zhuan [Biographies of Goddesses], par A. Lévy.
22/ Szû-ma Hsiang-ju (mort en 117 av. J.-C.) : pp. 1270-1272. Le grand poète Sima Xianru par O. Milburn.
23/ Tang Yin (1424-1524) : pp. 1275-1276. Pour son Sengni niehai (Moines et nonnes dans l'océan des péchés, Picquier, 1992), présenté par A. Lévy.
24/ Yaohu yanshi [The Voluptuous History of Fox Demons] : pp. 1443-1444. Galantes chroniques de renardes enjôleuses (Picquier, "Le Pavillon des corps curieux", 2005), par PK.
25/ Zhang Zu (né en 657, mort en 730) : pp. 1457-1458. A. Lévy sur le Yu xianku [Visiting the Fairy Cave] attribué à Zhang.
26/ Zhaoyang qushi : pp. 1459-1460. Traduit en français sous le titre de Nuages et pluie au palais des Han (Kontler, trad., Picquier, 1990), il est présenté ici par Wu I-Hsien (Columbia University).
27/ Zhulin Yeshi [Unofficial History of the Bamboo Grove] : pp. 1460-1462. Traduit en français sous le titre de Belle de Candeur (C. Kontler (trad.), Picquier, 1990), ce roman est ici présenté par A. Schonebaum.

Un constat s'impose :

8 (ou 9 : l'article sur Jin Ping Mei ?- n° 13) signatures seulement qui se répartissent la charge de la manière suivante : A. Lévy, 10 entrées (n° 1, 8, 9, 12, 14, 16, 17, 21, 23 et 25) ! ; D. Wile, 5 (n° 2, 3, 18, 19 et 20) ; PK, 4 (n° 5, 10, 15 et 24) ; O. Milburn (n° 6 et 22) et A. Schonebaum (n° 7 et 27), 2 ; P. Che (n° 11), C. Fouillade (n° 4) et Wu I. (n° 26), une.
• surtout, l'ouvrage ne propose que 27 entrées seulement pour un corpus bien plus vaste dont l'inventaire serait à entreprendre.
• ce choix dépend du reste en grande partie de celui réalisé voici plus de 40 ans déjà par Robert H. van Gulik pour son incontournable Sexual Life in Ancient China: A Preliminary Survey of Chinese Sex and Society from ca. 1500 B.C. till 1644 A.D. (Leiden : E.J. Brill, 1961) [La vie sexuelle dans la Chine ancienne. (Louis Evrard, trad.) Paris : Gallimard, "Bibliothèque des histoires", 1971].

Beaucoup reste donc à faire en vue d'une hypothétique réédition augmentée de cette très riche encyclopédie qui réserve de bonnes surprises, et qui peut rendre de véritables services autant au chercheur qu'au simple curieux de la littérature érotique mondiale.

mercredi 27 septembre 2006

Officiel Kong

A quelques jours du 2557ème anniversaire de sa naissance, laquelle a été fixée arbitrairement au 28 sept. 551 av. J.-C., la Fondation Confucius de Chine (中国孔子基金会) a dévoilé à Qufu (Shandong) une statue de Confucius. Celle-ci a été présentée en grande pompe comme la "représentation de référence" en un mot la "statue officielle" du grand penseur (孔子标准像). La Fondation se défend de vouloir s'octroyer un monopole, mais assure vouloir contribuer à la diffusion de la pensée de Confucius, notamment à l'étranger, en fournissant une image unique et facilement reconnaissable du Maître. Les commentaires n'ont pas manqué de fuser (cf. notamment le dossier sur Sina.com). Cette initiative est naturellement diversement appréciée. Purement commerciale pour les uns, elle est jugée tout simplement ridicule par d'autres comme Ren Jiyu 任继愈. Certains ont même fait le rapprochement avec une représentation vieille de 1000 ans. A chacun de juger à partir de ce cliché. Ah ! si seulement, elle était en chocolat, tout le monde serait d'accord.

En bonus, voici un choix de photos prises très récemment au Kongzi miao 孔子庙 (Temple de Confucius) et au Guozijian 国子监 (Collège Impérial) de Pékin, lesquels sont en train de faire peau neuve pour les JO de 2008. >> ici <<